Revue 108 : Éditorial de Jean-Marc Bœuf, secrétaire général

Revue 108 : Éditorial de Jean-Marc Bœuf, secrétaire général

Consulter les extraits de la Revue 108

UNE HISTOIRE DE VIDE ET DE PLEIN

L’anomie, mot savant crée par Emile Durkheim dans son ouvrage « Le suicide. Etude de sociologie », désigne la désorganisation sociale liée à la disparition de valeurs communes à un groupe.

Selon Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS, les français seraient particulièrement anomiques, champion de la défiance. Il y voit un danger majeur pour la République et la démocratie. Cette défiance expliquerait, selon lui, les mouvements de protestation actuels, des gilets jaunes au refus du passe sanitaire.

Cette défiance se manifesterait également contre les corps intermédiaires dont font partie les syndicats.

Le prix de la défiance, les syndicats le mesurent chaque année au nombre de syndiqués. Cependant, interrogeons-nous : est-ce défiance, méfiance ou désintérêt ?

Comme nous l’avons souvent exprimé, les syndicats ne choisissent pas le terrain sur lequel il leur faut établir le rapport de force.

De ce point de vue, la loi de transformation de la fonction publique a profondément labouré ce terrain, faisant disparaître beaucoup de ce que nous avions semé pour la défense de nos collègues. Le prix à payer, plus qu’une réelle défiance, est plus simplement celui du désintérêt d’une partie de celles et de ceux qui jadis étaient en confiance.

« Réinventer le syndicalisme » c’est aussi reconstruire l’intérêt d’avoir à se syndiquer, c’est de convaincre qu’il nous faut agir sur le politique.

Mais « réinventer le syndicalisme » c’est également lutter de plus en plus contre ce que j’appellerais l’auto-anomie de structures, ministères, académies, grands établissements, universités… qui, parfois, sous couvert d’autonomie, tendent de plus en plus à s’affranchir des règles communes et participent ainsi à la désorganisation sociale et à l’esprit de défiance.

Alors bien sûr, au moment de tirer le bilan d’une action, il y a toujours deux manières de regarder le verre, soit à moitié vide, soit à moitié plein. La lutte contre la loi 3DS, par exemple, si elle a permis d’éviter la décentralisation statutaire des adjoints gestionnaires, n’a pas permis d’écarter tout danger. Et pourtant, la réponse est simple : sans action syndicale, le verre eût été vide.  

L’anomie, c’est la volonté du vide.

Le syndicalisme c’est la volonté du plein, pour Aujourd’hui & pour Demain.

Jean-Marc Boeuf

Secrétaire général A&I UNSA