Etat des lieux : COVID 19 en EPLE : Vent de folie en temps de crise.

Etat des lieux : COVID 19 en EPLE : Vent de folie en temps de crise.

La crise de la COVID est un révélateur cruel d’une évidence sociétale : l’accumulation des individualités ne forme pas un tout.

Nous, personnels des EPLE, professionnels de l’administration, de la logistique, de la sécurité des biens et des personnes, de l’entretien des locaux, nous avons à souffrir, peut-être plus que d’autres, de la gestion calamiteuse de la crise au quotidien.

Le premier constat, c’est celui de l’existence d’un protocole sanitaire. Il devrait s’imposer à nous tous, fonctionnaires de l’Education Nationale. Le problème, c’est que celles et ceux qui nous entourent ne reconnaissent pas plus qu’avant crise les directives de leur employeur. Liberté de penser, liberté de faire ce que je veux quand je le veux, puisque liberté pédagogique… La situation a pris un tour tragique : une peur irrationnelle a gagné le plus grand nombre, avec son dommage collatéral : la folie des protocoles sanitaires locaux.

Quels que soient les délires des spécialistes auto-proclamés de la lutte pour sa survie covidaire, il faut valider le toujours plus : gel hydroalcoolique dans toutes les salles de classes, désinfection des locaux à toute heure, masques achetés en catastrophe parce que ceux de l’employeur nous empoisonnent, port de visière, port d’une blouse chirurgicale, désinfection de claviers d’ordinateurs toutes les heures, pose et dépose de film alimentaire sur ces mêmes claviers, ouverture et fermeture des fenêtres par les agents, à toute heure, voire même toilettes réservées aux enseignants désinfectées après chaque utilisation, et même acquisition de points de lavage des mains mobiles pour que les élèves se lavent les mains le plus loin possible, au fond de la cour… J’en passe et des meilleures…

Nous sommes les spectateurs impuissants d’une peur qui s’auto-alimente des protocoles « maison » qui nous sont imposés, et qui alimentent le syndrome du complot : chez le voisin on fait plus, c’est donc qu’on fait moins pour nous. Ça prouve que la direction de l’établissement est incompétente, parce qu’elle ne prend pas la mesure de la vraie situation, contrairement au voisin.

Nous faisons face à des décisions irrationnelles, prises dans l’urgence, au gré des humeurs, sans aucun fondement scientifique avéré. Et pour nous, c’est « y’a qu’à fournir pour demain sinon on ferme ! » N’en déplaise à tous ceux qui vivent dans un monde parallèle : l’administration, c’est un métier. La logistique, c’est un métier. La sécurité des biens et des personnes, c’est un métier. L’entretien des locaux et la désinfection, c’est un métier.

Dans la vraie vie, il y a des décisions qui doivent se prendre après concertation et réflexion, des délais de livraison, des règles en matière d’utilisation des produits de désinfection, la nécessité d’optimiser les moyens et de respecter un budget…

Nous, nous n’allons pas expliquer aux enseignants, et à d’autres, comment travailler. Alors, qu’on respecte notre travail et notre expertise.

Au fond, il y a dans la manière dont on nous traite beaucoup de mépris car nous sommes mis au service des besoins des autres. Certes, servir les besoins des autres, c’est sans doute notre métier. Le problème, c’est que ces besoins sont aujourd’hui parfois totalement déraisonnables.

Ce que nous apprend dès à présent cette crise, c’est que les personnels administratifs et en particulier l’adjoint gestionnaire dans ses fonctions logistiques, en toute humilité, ne peut pas tout contrôler. Il ne peut donc être tenu responsable des conséquences de la situation sanitaire.

La manière dont les autresvivent la situation, ce qu’ils pensent de la situation sanitaire, leur état de panique plus ou moins avancé, nous n’y pouvons rien.

En revanche, notre attitude professionnelle, notre volonté de participer positivement au bien-être et à la réussite de nos enfants, notre volonté de répondre aux demandes des élèves et de leurs familles tout au long de la chaine administrative et de gestion, en bref toutes les actions que nous menons pour maintenir l’équilibre de nos établissements jouera un rôle majeur quoique méconnu, dans la sortie rapide de cette crise.

Les personnels attendent de celles et ceux qui les encadrent, une Vision. Il faut les rendre fiers de tout ce qu’ils font pour assurer le bien-être et la sécurité sanitaire. Il faut aussi affirmer nos valeurs, et bien faire comprendre que c’est l’intérêt général, seul, qui motive notre action, et qui nous mobilise.

Notre rôle d’écoute est fort : nous devons, plus que jamais, créer du lien entre ceux qui refusent à présent de se comprendre, il faut continuer à être les yeux du terrain, et à faire remonter ce qui se passe réellement dans l’établissement, et non pas ce qu’en pense tel ou tel groupe de pression.

En un mot, nous devons tenir, plier un peu plus mais ne pas céder. Notre attitude envers les collègues, notre capacité à proposer et à agir, la justesse et la rigueur de nos décisions, tout cela participe positivement à la sortie de crise, par l’exemple que nous donnons de notre professionnalisme.

Prendre soin des autres, c’est notre métier.

Prenez aussi soin de vous, car nous ne sommes épargnés ni par la maladie parfois, ni par les exigences disproportionnées et par l’absence de contrôle de certains de nos partenaires.

Nous, syndicat A&I-UNSA, nous représentons tous les collègues de terrain. Nous entendons les difficultés de nos collègues, nous sommes nous aussi victimes des errements qui peuvent gagner progressivement le plus grand nombre.

Partout, A&I UNSA fait entendre la voix des administratifs des établissements. Trop souvent perçus comme des personnels de compagnie, nous affirmons que le système tiendra, parce que nous tenons.

Soyons en fiers, tenons bons et revendiquons sans relâche ce qui n’est que la juste rétribution de nos efforts. 

Jean-Marc Boeuf et Jean-Marc Cazaudumec, secrétaire général et secrétaire national chargé de l’enseignement scolaire.

Paris, le 27 novembre 2020.