STOP aux injonctions contradictoires

STOP aux injonctions contradictoires

Jean-Marc Boeuf, secrétaire général d’A&I UNSA, vient d’adresser un courriel à la Directrice des Affaires Financières suite au  « FLASH INFO n°22 – 2019-2020 – Crise sanitaire : fonctionnement administratif financier des EPLE »

Madame la directrice

Par « FLASH INFO n°22 – 2019-2020 – Crise sanitaire : fonctionnement administratif financier des EPLE », vous donnez aux cadres de direction et d’administration des EPLE des  instructions s’agissant des voyages scolaires annulés, je cite :

« Dans le cadre de leur plan de continuité administrative, les EPLE doivent procéder en priorité au remboursement des familles connues (ou qui se sont signalées) comme étant en difficulté économique, et ce d’autant que certaines familles peuvent subir une baisse de leurs revenus dans le contexte actuel de crise sanitaire (situations de chômage partiel notamment).
Au regard des règles de confinement en vigueur, l’application GFC n’étant pas accessible à distance, la mobilisation des agents qui seraient amenés à se déplacer pour se rendre dans les établissements sera justifiée par l’urgence des situations économiques de ces familles. »

Cette note depuis sa diffusion suscite beaucoup d’interrogations voire d’irritations chez nos collègues de toutes catégories.

Depuis le début de la crise que traverse notre pays, mon organisation s’agissant de la situation des personnels administratifs n’a cessé de souligner un certains nombre de points et de principes que nous avons récemment eu l’occasion de rappeler à M.le ministre et qui ont fait l’objet de notre part d’un communiqué : https://www.aeti-unsa.org/crise-sanitaire-covid-19-ai-unsa-recu-par-le-ministre/

Afin de cadrer préalablement mon propos s’agissant des demandes qui ont été formulées à l’adresse des personnels des EPLE, je voudrais particulièrement revenir ici sur trois d’entre eux qui constituent le contexte professionnel contraint au sein duquel nos collègues évoluent.

Le premier est simplement la règle édictée par le gouvernement lui-même : confinement et télétravail sont la règle, déplacement et travail sur place sont l’exception. Il faut garder à l’esprit l’extrême contagiosité du covid 19 qui demeure, pour reprendre les récents propos du Premier ministre, « sans traitements éprouvés » : pour A&I UNSA comme pour beaucoup d’autres, cet impératif de santé publique doit guider avant tout l’organisation de la continuité du service.

Ensuite, au sujet des obligations pesant sur les personnels en cette période inédite, il ne peut s’agir que d’une obligation de moyens et aucunement de résultat.

Enfin, les moyens pouvant être mis en œuvre sont fortement limités par l’employeur éducation nationale lui-même du fait des environnements logiciels dépassés ou structurellement inadaptés, ce que d’ailleurs, vous ne méconnaissez nullement.

Dans ce contexte contraint, votre note nous apparaît, même si elle n’est pas totalement hors de propos s’agissant de françaises et de français pouvant en effet subir des difficultés économiques,  pour tout ou partie « hors sol » et inadaptée au contexte actuel pour des motifs  que vous n’ignorez pas (interdiction d’utiliser les logiciels à distance pour des motifs de sécurité qui nécessitent pour être levés l’intervention de la DNE -sous quels délais? ; recours en cas de difficultés de trésorerie à une aide des services académiques ou des collectivités -sous quels délais ? Ne s’agit-il pas là de « vœux pieux » ?)

De fait, la rédaction de la note laisse entendre que reposerait en l’espèce sur les personnels des EPLE une obligation de résultat alors qu’il ne peut s’agir, nous le réaffirmons, que d’une obligation de moyens que l’éducation nationale elle-même compromet par l’inadaptation des outils qu’elle met à disposition !

Face à cette crise, tous les EPLE et les personnels ne sont pas égaux . Tous sont loin d’être logés sur place et, comme l’a très bien exposé en substance un recteur tout récemment, « Sur la question des logés, la situation est effectivement difficile. Ils sont dans un grand vide, anxiogène. Il faut prendre conscience de cette contrainte. » Il faut savoir, par exemple, que dans beaucoup d’établissements, les personnels des collectivités, en consignes de confinement, sont absents, ne permettant pas un entretien ne serait-ce que minimum des établissements.

Comment par ailleurs déterminer « l’urgence économique » face à une dépense qui au départ était une charge librement consentie et alors que les familles les plus nécessiteuses ont déjà pu faire l’objet d’une aide ? Faudra-t-il exiger un document de pôle emploi ? Se fier à la bonne foi d’une attestation sur l’honneur? A partir de quel montant doit-on considérer que le risque est avéré ? L’urgence économique » en soi ne relève-t-elle pas plutôt d’une action de l’État comme cela a été annoncé pour les entreprises ?

Nous ne comprendrions pas que des griefs soient retenus contre des collègues agents comptables, adjoints gestionnaires, fondés de pouvoir, secrétaires de catégorie B et C qui ne feraient pas les choses parce qu’ils ne seraient pas en moyens de le faire.

Il serait inacceptable que certains s’achètent une conscience à bon compte en faisant reposer sur d’autres le soin d’obtempérer aux injonctions contradictoires générées par le télétravail impossible : En conséquence, nous demandons qu’aucune pression hiérarchique ne soit exercée sur nos collègues.

Soyez assurée, Madame la directrice, que les personnels administratifs quel que soit leur lieu d’exercice savent où est leur devoir. Ils ont besoin, comme toutes et tous en ce moment, d’accompagnement et de bienveillance, pas d’injonctions qui ne font que mettre cruellement en lumière, toutes proportions gardées, les failles et impérities de leur employeur.  

Je vous prie de croire, Madame la directrice, à l’expression de ma parfaite considération.

J-M Bœuf